Le chemin périlleux vers la terre promise de l’ADN
Séquencer, décoder et, en définitive, modifier notre ADN pour améliorer et fortifier la condition humaine, telle est la promesse de la biotechnologie du XXIe siècle. Les nouveaux outils d’édition génomique vont-ils renforcer notre détermination en faveur de la liberté génétique ? Ou bien ces découvertes devraient-elles nous amener à prendre du recul pour envisager d’autres voies de progression ?
Le récit biblique de l’Exode semble très éloigné du XXIe siècle, tant par sa date que par la signification qu’il porte. Pourtant, l’idée de délivrance d’une captivité et l’espoir d’une Terre promise sont tout sauf surannés.
Les points forts de cette histoire emblématique sont connus de tous et peuvent même servir de trame à notre version moderne de ce périple. Il y a environ 3.500 ans, Dieu convertissait Moïse puis, par une série de fléaux miraculeux, il convainquait Pharaon de « laisser aller [son] peuple ». Les Israélites, guidés par une colonne de feu la nuit et par une nuée le jour, traversaient la mer Rouge et recevaient les Dix Commandements. Enfin, après moult rechutes et souffrances, ils entraient dans le Pays promis, sur les bords de la Méditerranée orientale. Quitter l’Égypte et vénérer Dieu dans leur propre pays, telle était leur destinée promise.
Aujourd’hui, nous avons entrepris un autre type d’exode. En tournant son regard et ses espoirs vers la « colonne » biologique qu’est l’hélice de l’ADN, l’humanité s’est embarquée dans un périple tout aussi difficile et prodigieux : une fuite de « l’Égypte » de notre propre génome. Notre espérance moderne porte sur la délivrance de la maladie, de la dégénérescence et de l’horloge biologique ; en termes simples, nous ne désirons rien moins qu’une vie longue et en bonne santé, pour nous-mêmes et nos enfants.
Réinitialisation génétique
Se lancer dans un périple de ce genre n’est pas une idée nouvelle. Dans sa version personnelle de « Laisse aller mon peuple », Julian Huxley a créé le terme transhumanisme. Avec le déclin de l’ère spatiale et la découverte de la structure de l’ADN, Huxley croyait que nous étions à l’aube d’un nouvel âge de l’homme. Dans son ouvrage New Bottles for New Wine [à vin nouveau, nouvelles bouteilles] publié en 1957, il décrit sa vision de notre « devoir cosmique » d’harmoniser nos nouvelles découvertes avec un humanisme renforcé : « En fait, la mission se résume ainsi : concrétiser pleinement les possibilités de l’homme, que ce soit en termes d’individu, de communauté ou d’espèce, au cours de son aventure processionnelle le long des couloirs du temps. »
Le rythme de cette marche s’accélère. Comme le remarque Paul Knoepfler, biologiste cellulaire à l’université de Californie (Davis) et blogueur scientifique très apprécié, « le transhumanisme est bien vivant aujourd’hui ». Dans son acception génétique moderne, c’est une victoire sur l’asservissement aux gènes que la nature nous transmet : « La convergence d’avancées transformatrices réalisées dans les technologies liées à la génétique, à la reproduction et aux cellules souches va changer notre monde, et nous avec. »
Nous sommes, hélas, « programmés pour mourir », déclare l’expert scientifique des cellules souches Clive Svendsen. Cette programmation se trouve dans nos gènes. Selon la théorie évolutionnaire, nous existons pour propager nos gènes. C’est notre ADN qui recherche l’immortalité et, en un sens, comme chacun de nous est le produit d’un épisode réussi de reproduction, nos gènes ont accompli leur mission. Chacun de nous compose une chaîne ininterrompue qui remonte dans le temps, de génération en génération, aussi loin que l’imagination le permet. Après avoir atteint l’âge adulte et avoir produit une nouvelle génération, notre travail biologique est terminé.
Nous voulons aujourd’hui briser le paradigme évolutionnaire. « Dans un sens, la sélection naturelle a disparu et nous n’avons vraiment plus besoin de mourir », a expliqué Svendsen à Vision.
Alors non seulement nos gènes nous accablent mais, avec la bonne reprogrammation, ils pourraient aussi nous délivrer. En matière scientifique, on ne peut regarder nulle part ailleurs pour retarder notre mortalité et améliorer nos moyens d’existence. Nous devons nous transformer. En tant qu’êtres physiques, nous sommes évidemment, d’une certaine façon, soumis à notre biologie. Mais depuis que la structure de la molécule d’ADN a été découverte en 1953, le gène apparaît de plus en plus distinctement comme le point d’entrée, le commutateur principal de notre destinée biologique.
À la pointe des ciseaux
Ce domaine n’est plus réservé aux manuels élaborés par et pour des reclus de la génétique vêtus de blanc et gantés de bleu, confinés dans des laboratoires. Les progrès révolutionnaires accomplis dans le séquençage des gènes, ainsi que dans l’exploration et le traitement numérique des données, sont exponentiels. Les informations génétiques gagnent ainsi en capacité de commercialisation et en disponibilité auprès du public. Par exemple, 23andMe, société qui vend des tests ADN directement aux particuliers, vise à « permettre aux gens d’accéder au génome humain, de le comprendre et d’en bénéficier ».
Affichant un niveau de confiance sans précédent dans les principaux processus de l’analyse génétique, la FDA (Food and Drug Administration, secrétariat américain aux produits alimentaires et pharmaceutiques) a récemment homologué le produit de cette entreprise. Dans son communiqué de presse, elle indique avoir « autorisé ce jour la commercialisation des tests de 23andMe proposés par le service d’Analyse génomique personnelle et consacrés au dépistage des risques génétiques liés à dix maladies ou états médicaux. Pour la première fois, la FDA homologue des tests proposés directement aux clients et fournissant des informations sur la prédisposition génétique d’un individu à plusieurs maladies ou états médicaux, ce qui est susceptible d’aider à prendre des décisions sur des choix de mode de vie ou à documenter des discussions avec un professionnel de santé ».
Ainsi, comme l’ADN a pris le devant de la scène biologique, son rôle et son pouvoir ont gagné en visibilité auprès d’un public élargi. Tel un phare, l’ADN attire tous les regards, et il sera de plus en plus difficile de l’ignorer, quel que soit notre intérêt personnel pour les cellules ou les produits chimiques. Nous sommes naturellement curieux de notre histoire familiale mais aujourd’hui, nous disposons d’une fenêtre sur son avenir.
Cette opportunité de connaissance scientifiquement validée alimente un désir croissant de réparer, d’interférer et de composer avec le destin. Le pharaon génétique omniscient et esclavagiste se transforme : autrefois oppresseur inflexible, il devient une sorte de grand-père grognon mais malléable, apparemment plus facile à manipuler qu’on le croyait au début. Avec les nouvelles technologies d’édition génique telles que CRISPR (protéine pouvant être paramétrée pour découper et ré-apparier l’ADN avec précision), il semble que nous puissions un jour réparer ce qui est cassé. Bien plus, nous serons en mesure de négocier et de reconcevoir le futur au lieu de nous contenter d’attendre son déroulement biologique.
« La curiosité et l’ingéniosité humaines ont découvert un moyen simple et efficace de supprimer d’un coup de ciseaux les erreurs de la nature dans la grammaire du génome humain, et de substituer des séquences correctes à des séquences incorrectes », écrivent Sheila Jasanoff, J. Benjamin Hurlbut et Krishanu Saha. « CRISPR-Cas9 offre, à première vue, une ouverture technologique qui paraît trop belle pour que l’humanité la rejette. C’est un moyen rapide, économique et étonnamment précis de s’attaquer aux erreurs génétiques de la nature et d’assurer aux porteurs d’afflictions accidentelles qu’ils seront traités équitablement par des interventions médicales spécifiquement adaptées à leur état. Évidemment, ce sont des perspectives grisantes pour la science et prometteuses pour le salut des patients atteints de pathologies incurables. »
C’est une proposition absolument exaltante d’imaginer de fuir de l’« Égypte intérieure » de notre ADN défectueux. Grâce à notre arsenal de miracles biotechnologiques constitué au fil des dernières décennies, nous envisageons la double hélice sous un nouveau jour. Selon Jasanoff, « transcender la condition humaine consiste en partie à échapper physiquement à la mort et aux autres limites irritantes imposées aux aptitudes humaines, comme la perte de mémoire, la douleur et le handicap, mais la transcendance a aussi un attrait salvateur [...]. La science et la technologie étant à disposition immédiate, ce souhait de perfection est à portée de main : dans l’imaginaire post-humain moderne, le souhaitable devient possible ».
N’étant pas enchaînée à un destin génétique, l’hélice a montré son autre visage : celui de la malléabilité… et avec la malléabilité, l’espérance.
« Mais, comme nous en avertissent Jasanoff, Hurlbut et Saha, il ne faut pas que l’enthousiasme occulte la nécessité d’une véritable réflexion au sein de la société à propos des interventions sur certaines des fonctions les plus fondamentales de la nature. »
« Ne nous berçons pas d’illusions en pensant que le nouveau débat sur la modification génétique des lignées germinales, soulevé par CRISPR-Cas9, porte sur le sauvetage de quelques individus porteurs du fardeau que constitue une maladie génétique. C’est tout simplement un débat sur la signification future de l’humanité. »
Néo-eugénisme
Huxley a identifié le malaise qui allait surgir à l’apparition de nouvelles opportunités : « Les gens sont déterminés à ne pas tolérer un niveau inférieur à la norme de santé physique et de vie matérielle, maintenant que la science a révélé la possibilité de l’élever. L’agitation va avoir des conséquences désagréables avant de se dissiper ; mais c’est par essence une agitation bénéfique, une force dynamique qui ne s’apaisera qu’après avoir posé les bases physiologiques de la destinée humaine. »
Comme l’ont remarqué les sociologues et historiennes de la science Dorothy Nelkin et Susan Lindee dans leur livre de 1995, La mystique de l’ADN, nous tendons à doter la double hélice de pouvoirs divins. À l’époque, dans les premières années du Projet Génome humain (ou PGH) destiné à séquencer les trois milliards de bases ADN de notre génome, elles annonçaient déjà son éclat séduisant : « La valeur attribuée au gène, en tant que facteur déterministe, programme, base des relations sociales, et origine du bien et du mal, véhicule avec elle de rassurantes notions de certitude, d’ordre, de prédictibilité et de maîtrise. » Mais l’espoir de « certitude » et d’« ordre » n’est pas intrinsèque à la molécule elle-même. Ce sont plutôt des qualités que nous devrons lui transmettre ; l’ADN n’est pas apprivoisé, et nous devons apprendre à dompter ses pouvoirs mutables et instables aux multiples facettes : « Dans cette optique, les scientifiques et les médecins sont investis de davantage d’autorité et de pouvoir ; ils deviendront les gestionnaires d’une société qui sera médicalisée. »
Plus de 20 ans après, le projet Génome humain nous a donné une perception plus nette de notre code ADN, et nous avons tendance à succomber aux explications courantes sur les capacités de contrôle. En ajoutant CRISPR ou d’autres techniques d’édition génique, nous nous rapprochons encore de l’objectif de reconception humaine. Dans un échange avec Vision, Lindee a déclaré que « ce qui est drôle, c’est que nous pensions que notre livre serait vite dépassé et il a fallu se dépêcher pour le publier. Aujourd’hui, on dirait que les tendances que nous relevions ont encore gagné du terrain, et l’ADN est vendu aux particuliers et aux patients par des moyens qui seraient comiques s’ils n’étaient pas pitoyables. »
Selon Lindee, la nature « limitée et probabiliste » de l’information génétique devrait raisonnablement freiner tout ce battage. Mais comme l’écrit Nathaniel Comfort, professeur d’histoire de la médecine à l’université Johns Hopkins, le projet Génome humain « a permis aux eugénistes de se montrer au grand jour. Le fantasme de la maîtrise de notre évolution est bien vivant ».
C’était vrai même avant que les gènes soient connus ; le désir de perfection humaine, d’après Comfort, est une sorte d’élan eugénique insufflé dans notre caractère. Il ajoute que « même au début du [XXe] siècle, des partisans de la santé héréditaire faisaient des promesses identiques à celles que nous entendons aujourd’hui : la génétique va améliorer notre santé, nous vivrons plus longtemps, nous serons plus intelligents, plus heureux… meilleurs. »
Comfort considère la bio-ingénierie comme la forme actuelle de l’eugénisme, une sorte de néo-eugénisme. Concernant le potentiel actuel de l’édition génique, Comfort nous a déclaré : « Il est toujours difficile de lire l’importance historique d’un événement pendant qu’il se produit, mais CRISPR semble être le genre de technologie révolutionnaire qui pourrait banaliser le génie génétique. »
« Le génie biologique part de l’intuition que nous sommes loin de réaliser pleinement le potentiel [de nos] corps organiques. »
En transposant aujourd’hui « la mystique de l’ADN », Comfort remarque une propension à « une accélération en raison du scientisme et de la technophilie. CRISPR est considérée comme une affaire très lucrative. De plus, cela nous incite à chercher des solutions high-tech rentables à des problèmes de santé, plutôt qu’à nous attaquer à des préoccupations moins chics, comme la diminution de la pauvreté, l’amélioration des systèmes sanitaires et éducatifs, les disparités raciales et sociales dans le domaine de la santé. Constater que les soins dépendent plus de la cote des actions que des besoins des patients ne me plaît pas. »
Il ajoute : « J’exprime ces préoccupations non comme une vaine tentative d’actionner le frein d’urgence des avancées biomédicales ; mon objectif est plutôt d’étouffer le tapage médiatique pour que les technologies performantes comme CRISPR soient utilisées avec humanité, afin que les personnes passent avant les profits. »
L’objectif transhumaniste
Bien que Huxley et ses contemporains n’aient compris que des aspects rudimentaires de la structure de l’ADN, il semble prescient quand il décrit le partage des eaux génétiques par la biotechnologie. Selon lui, « l’exploration enthousiaste mais scientifique des possibilités et des techniques pour les concrétiser va rationaliser nos espérances et placer nos idéaux dans le cadre de la réalité, en montrant combien d’entre eux sont effectivement réalisables. »
Le champ potentiel de l’édition génique (y compris la correction d’une lignée germinale humaine, en vue d’effacer réellement le code d’une maladie dans une lignée familiale) va sans doute placer la destinée génétique sous notre contrôle. La fabrication et la modification de cellules d’ovules et de sperme pointent à l’horizon, et des enfants ont déjà été créés à partir de l’ADN de trois parents (l’ADN d’une mère, l’ADN d’un père et l’ADN mitochondrial de l’ovule d’une donneuse). Les embryons humains destinés (ou pas) à la fécondation in vitro et à l’implantation sont systématiquement testés pour déceler la présence de défauts génétiques. Même si nous sommes d’emblée hésitants et allons certainement discuter un moment du chemin à suivre, beaucoup sont sûrs des décisions finales et de la trajectoire adoptée en définitive.
« Je pense que la manipulation des lignées germinales humaines est inévitable, et qu’il n’existera en fait aucun moyen efficace de réguler ou de contrôler le recours à la technologie d’édition génique dans la reproduction humaine », déclare J. Craig Venter dans la revue scientifique britannique Nature Biotechnology. Les opinions de Venter, l’un des principaux promoteurs du projet Génome humain, qui a depuis encouragé le développement de cellules synthétiques, ont un accent réaliste : « Notre espèce ne reculera devant rien pour tenter d’améliorer les traits perçus comme positifs et de supprimer le risque de maladie ou les traits perçus comme négatifs dans leur future progéniture ; ce sera en particulier le cas de ceux qui auront les moyens ou l’accès aux technologies d’édition et de reproduction. La question n’est pas si, mais quand. » Il poursuit en lançant toutefois un avertissement : « Ce n’est qu’en approfondissant considérablement notre compréhension du génome humain [...] et des conséquences des changements envisagés, que nous aurons la connaissance nécessaire pour prendre des décisions sages. Jusque-là, l’édition du génome humain devrait être considérée comme une expérimentation humaine aléatoire. »
Marcy Darnovsky, qui dirige en Californie le centre Génétique et Société (Center for Genetics and Society), lance une mise en garde similaire. Lors du sommet international de 2015 consacré à l’édition génomique chez l’homme, elle notait : « Si l’on autorisait l’édition génique de lignées germinales humaines, quel qu’en soit le motif, elle risquerait d’échapper à tout type de limites réglementaires, d’être adoptée à des fins de perfectionnement et de faire émerger un eugénisme guidé par le marché, [...] d’où des conséquences sociales dangereuses au-delà d’un seuil acceptable. »
Vieilles outres et outres neuves
À l’instar de la sociologue Sheila Jasanoff, J. Craig Venter et Marcy Darnovsky reconnaissent la nature humaine : quand on peut, on veut. Du point de vue de Julian Huxley dans New Bottles for New Wine, nos technologies nouvelles grandioses (le vin) allaient nous inciter à porter sur nous et notre potentiel un regard nouveau, comme si nous étions des bouteilles ou des « outres neuves ». Mais son analogie est incomplète, parce que notre nature n’a pas changé. Notre savoir nous enhardit au lieu de nous rendre modestes ; notre nature humaine n’a pas fléchi.
Nous pouvons déceler le problème dans ce que Huxley décrivait comme le « concept central d’ordonnancement » du transhumanisme ; c’est-à-dire l’humanisme lui-même, la croyance que la destinée humaine repose dans nos mains seules. C’est la même pensée qui a perturbé le cheminement des Israélites et les a égarés dans le désert. Leur problème, comme le nôtre aujourd’hui, était l’incrédulité sous-jacente face à tout ce qui n’est pas physique. « Il existe une seule réalité », insistait Huxley, « et l’homme en est le prophète et l’explorateur ».
Tout comme les Israélites ont oublié leurs accords avec Dieu en pensant que c’était leur pouvoir humain qui contrôlait leur destinée, notre croyance en notre science et en la fiabilité des décisions humaines continue de faire notre ruine. En soi, chercher à améliorer notre santé n’est ni mauvais ni contraire à la volonté de Dieu, en aucune manière. Non, notre problème est que nous demeurons englués dans la conviction que nos choix sont souverains. Les Israélites ont été mis en garde sur le danger d’un tel orgueil : « prends garde que ton cœur ne s’enfle, et que tu n’oublies l’Éternel, ton Dieu, qui t’a fait sortir du pays d’Égypte, de la maison de servitude [...]. Garde-toi de dire en ton cœur : Ma force et la puissance de ma main m’ont acquis ces richesses » (Deutéronome 8 : 14, 17). Mais l’avertissement a été ignoré.
On pourrait dire qu’ils se sont retrouvés dans un Nouvel endroit, mais avec le même Vieux cœur.
La notion de déterminisme héréditaire (nos gènes sont notre salut ou notre perte) est incontestable mais incomplète. Nous sommes des êtres imparfaits, non pas à cause de nos gènes mais à cause de notre caractère. C’est un problème qui dépasse la réparation physique. Notre vide le plus profond, notre maladie la plus invalidante, notre plus grand besoin de régénération, seront toujours d’ordre spirituel plutôt que physique. Être « transformé » par le renouvellement de l’intelligence humaine, comme l’écrivait Paul, est la première guérison dont nous ayons besoin (Romains 12 : 2). Ce n’est pas un objectif transhumaniste. Cette intelligence renouvelée est cependant l’« outre neuve » qui peut contenir le « vin nouveau » du plan de Dieu pour la création (Matthieu 9 : 17). En se fiant à ce plan, une personne peut tenir bon même face à des situations apparemment désespérées, comme celles auxquelles a été confronté le peuple de l’ancien Israël (Exode 14 : 13‑14 ; Psaumes 33 : 13‑22).
« Je vous donnerai un cœur nouveau, et je mettrai en vous un esprit nouveau. »
Le Dieu de la Bible revendique une autorité de Créateur. Cela ne signifie pas pour autant qu’il est la cause de toutes les mutations terribles qui assaillent notre être physique ; comme l’observait Salomon, « tout dépend pour [nous] du temps et des circonstances » (Ecclésiaste 9 : 11). Il ne fait absolument aucun doute qu’en tant qu’espèce, nous souffrons énormément des catastrophes génétiques. Dans notre essence physique, se trouve un code ADN. Et jour après jour, cellule après cellule, génération après génération, des changements préjudiciables se produisent. Notre Créateur ne l’ignore pas. Mais nous ne sommes pas ce code.
L’exode suprême consiste à s’affranchir de la maladie et de la mort. Toutes deux sont réelles et imposent douleurs et souffrances dans nos vies aux niveaux individuel et collectif. Un jour, cependant, la douleur disparaîtra, et même la souffrance que la création physique tout entière endure actuellement sera guérie (Romains 8 : 18-22 ; Apocalypse 21 : 1-5).
Nous nous attendons à ce que l’ingénierie de l’ADN nous mène à une terre promise génétique conçue par nous-mêmes. Cette terre est un mirage ; elle sera toujours hors de portée. Peu importe ce que nous finirons par accomplir dans notre quête de perfection humaine (améliorer les bébés, les lignées familiales, la santé, le bonheur, l’image du corps, l’intellect, la longévité), cela ne suffira jamais. Nous imaginerons toujours quelque chose de mieux, une oasis juste derrière la prochaine dune. Et même en atteignant ce niveau suivant, nous ne serons jamais satisfaits ; cela ne remplacera pas la promesse que Dieu a réellement faite à la création et à nous, ses enfants, d’une relation rétablie et parfaite avec lui, puis les uns avec les autres (Actes 17 : 22-31).
Son plan pour chaque être humain ne s’appuie pas sur notre séquence de A, T, C et G ; il ne se fonde pas sur notre santé ou notre handicap, sur la durée plus ou moins longue de notre vie. Il repose sur une relation spirituelle qui existe au-delà du physique. Nous avons appris à utiliser ciseaux et aiguilles, à découper et apparier des gènes. La recombinaison génétique est notre fort. La restauration spirituelle, reconnexion entre l’esprit de l’homme et l’Esprit et la volonté de Dieu, est une prérogative divine et, finalement, le Pays promis pour toute l’humanité (1 Corinthiens 2 : 9-14).